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(LIGNE DE) CRÊTE, (LIGNE DE) TALWEG
Crest
(or ridge) line, thalweg (or course) line ; Kammweg, Talweg
Talweg est un mot allemand signifiant : chemin de la
vallée (et Kammweg signifie littéralement "chemin du peigne").
Synonymes de ligne de crête : ligne de faîte, ligne de partage des eaux (water divide), dorsale, crête d'interfluve. Synonymes de ligne de talweg : ligne de thalweg (ancienne écriture), ligne de réunion (ou collecte) des eaux (drainage line), fond de vallée. Voir aussi les lignes topographiques et ces sites : www.dai.ed.ac.uk/CVonline/LOCAL_COPIES/LOPEZ/node7.html en.wikipedia.org/wiki/Ridge_detection Local Features of smooth Shapes: Ridges and Courses Jan J .Koenderink and Andrea J .van Doorn ETUDE DE LIGNES D'INTERET NATURELLES POUR LA REPRESENTATION D'OBJETS EN VISION PAR ORDINATEUR Ridges in Image and Data Analysis Par David H. Eberly |
Les géographes définissent le talweg comme
la "ligne joignant les plus bas points des sections transversales successives
d'une vallée" ; mais qu'est-ce qu'une section transversale ?
La figure ci-contre montre que le point le plus bas de la section par un plan vertical d'une gouttière pentue n'est pas forcément au centre de cette gouttière, lieu intuitif du talweg (en bleu foncé) ; pire encore, la ligne de pente (en bleu clair) passant par le point le plus bas est orthogonale au plan. Cette orthogonalité ne permet donc pas de reconnaître le talweg... La section transversale doit être orthogonale au
talweg... Donc pour définir la section transversale, il faut déjà
le connaître !
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Voici un série de définitions qui ont été
proposées, dont on verra qu'elles ont toutes leurs limites ; lorsque
les lignes définies ci-dessous traversent des régions convexes,
ce sont des lignes de crête, et lorsqu'elles traversent des régions
concaves, ce sont des lignes de talweg (les points de la surface sont dits
"convexes" quand la section de la surface par un plan vertical tangent
à la ligne de niveau y présente un maximum d'altitude, "concaves"
quand elle y présente un minimum). Par réflexion horizontale,
les lignes de crête et de talweg s'échangent.
Première définition (proposée
par Jordan en 1872, reprise par Dieudonné dans son calcul infinitésimal
par exemple et utilisée par les topographes de l'IGN)
: les lignes de crête et de talweg d'une surface sont les lignes
de pente aboutissant à un col ; ligne de crête pour la
partie montante en partant du col, ligne de talweg pour la partie descendante.
Cette définition est non soutenable pour au moins trois raisons : 1 : pour une surface non bornée comme la gouttière ci-dessus, il peut y avoir une vallée, mais aucun col ! 2 : on peut toujours localement modifier la surface de sorte qu'une ligne de pente donnée aboutisse à un col (ou l'inverse) et pourrait donc devenir faîte ou talweg, ou ne plus l'être ; voir aussi le texte de Boussinesq ci-dessous. 3 : une ligne de pente partant d'un col peut très bien devenir asymptote à une autre (cf exemple ci-contre) : on obtient alors une vallée ayant plusieurs talwegs distincts ! |
Deuxième définition (proposée
par de Saint Venant en 1852, reprise par exemple dans le dictionnaire de
mathématiques de F. Le Lionnais et celui d'A. Warusfel, acceptée
comme définition
mathématique actuellement).
Une direction verticale étant choisie, les lignes
de crête et de talweg sont les lignes tracées sur la surface
joignant les points où la pente (de la section de la surface
par un plan vertical tangent à la ligne de
pente) présente un minimum le long de la ligne de niveau
correspondante. Autrement dit, ce sont les lignes
de déclivité minimale.
Cette définition formalise l'idée que le talweg est moins pentu que les lignes de pente voisines qui le rejoignent (et de même la crête est moins pentue que les lignes de pente voisines qui s'en éloignent).
Cependant les lignes rejoignent en fait les points d'inflexion
de lignes de pente (en projection horizontale), et ne sont donc des lignes
de pente que lorsque leur projection horizontale est rectligne.
Vue des crêtes (en rouge) et talwegs (en bleu foncé) de la surface z = y sin x qui sont obtenus avec cette définition, (plus quelques lignes de pente, en bleu clair) ; on remarque que les crêtes et talwegs qui aboutissent au col ne sont pas des lignes de plus grande pente, et ne correspondent pas aux crêtes et talwegs intuitifs tracés à droite !
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Troisième définition, par la courbure horizontale
maximale, proposée par Gauch en 1993.
Une direction verticale étant choisie, les lignes de crête et de talweg sont les lignes tracée sur la surface joignant les points où la courbure horizontale (donc celle de la ligne de niveau passant le point) de la ligne de niveau y présente un maximum. Cette définition est motivée par le fait que sur les cartes topographiques, les lignes de niveau présentent en général un coude au niveau des crêtes et talwegs, comme ci-contre. |
La courbure horizontale, dont il faut déterminer
les maximums, vaut :
(son signe détermine la concavité du point - positif pour
convexe, négatif pour concave).
Malheureusement, pour la surface z = y – x^4, en forme de vallée en U, la définition 3 donne, en plus de la droite centrale, qui correspond intuitivement au talweg géographique, deux droites parallèles (qui ne sont pas des lignes de pente), ce qui ferait 3 talwegs pour une vallée ! Pire encore, pour la surface z = y – rac(1-x^2), dont les courbes de niveau sont des arcs de cercle, tout point est extrémum de courbure, donc les talwegs recouvriraient toute la vallée ! |
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z = y - rac(1-x^2) : avec la def 3 tous les points de la vallée seraient points de talweg ! |
Quatrième définition (proposée par Boussinesq en 1872 - voir ci-dessous et reprise en partie dans le dictionnaire de mathématiques de F. Le Lionnais)
Les lignes de crête et de talweg sont les lignes
de pente dont les lignes voisines se rapprochent lorsqu'on les parcourt
dans le sens de la pente (talweg), ou s'éloignent (crête).
Définition non soutenable car toute ligne de pente d'une surface
non plane serait crête ou talweg !
Cinquième définition (proposée
par Rothe en 1915).
Les lignes de crête et de talweg sont les lignes
de pente singulières, en ce sens qu'elles correspondent aux
solutions singulières de l'équation différentielle
des projections horizontales des lignes de pente.
Avec les notations de Monge, l'équation différentielle
des lignes de pente de la surface z = f(x,y) étant qdx - pdy = 0,
les lignes de crête et de talweg sont formées de l'ensemble
des points où u est nul ou non défini, u étant un
facteur intégrant de qdx - pdy : u(qdx - pdy) = dF.
Par exemple pour la surface z = y sin x , qdx - pdy= sinx
dx - y cos x dy et
Cette définition a le défaut de ne pas être géométrique et de ne pas forcément fournir les lignes de pente partant d'un col ... |
Sixème définition :
Les lignes de talweg et de crête sont les lignes
de pente qui sont aussi lignes de courbure
de la surface (lignes tangente à une direction principale, ou la
courbure est extrémale).
On démontre que ces lignes correspondent aux lignes
de pentes dont la projection sur un plan horizontal est rectiligne, déjà
obtenues par la définition 2.
En résumé, il n'y a consensus que pour les lignes de pente à projection rectiligne !
Exemples :
- les lignes de faîte et de talweg d'une surface
de révolution d'axe vertical sont les méridiennes (si
l'on prend la définition au sens large ; au sens strict, il n'y
en a pas)
- les lignes de faîte et de talweg d'un cône
de direction verticale sont les génératrices coupant orthogonalement
les lignes de niveau (pour un cône ,
cela correspond aux extremums de f).
Note de M. J. Boussinesq présentée en 1872 à
l'Académie des Sciences.
Dans une Note du 3 juin 1872 (Comptes rendus, t. LXXIV, P. 1458), .Y.
C. Jordan a essayé de définir géométriquement
les faîtes et les thalwegs, lignes que tout le monde reconnaît
à la surface du sol et pourrait y tracer à fort peu près,
mais dont on éprouve quelque peine à dégager le caractère
précis. M. Jordan pense : 1° que ces lignes ne se distinguent
en rien, dans leur parcours, des autres lignes de plus grande pente; 2°
que leur seul caractère particulier se trouve en leur point de départ,
les noms de faîte et de thalweg devant être réservés
exclusivement aux lignes de plus grande pente, au nombre de quatre, qui
se détachent d'un col, et dont deux (faîtes) s’élèvent
à partir de ce point, tandis que les deux autres (thalwegs) vont
au contraire en s'abaissant. On voudra bien me permettre d'observer que
ces deux propositions me paraissent, la seconde trop restrictive, et la
première en désaccord avec la notion des faîtes et
des thalwegs, telle qu'elle se trouve, plus ou moins nette, dans tous les
esprits. Les thalwegs et les faîtes se distinguent en effet, sur
leur parcours, des autres lignes de plus grande pente; car l'habitant des
montagnes sait fort bien tracer, avec toute la précision possible,
le thalweg de sa vallée ou le faîte qui sépare le versant
qu’il habite du versant voisin, sans avoir besoin de se transporter à
l'origine, souvent très éloignée et presque inaccessible,
de ces lignes, et d'observer les circonstances, bien peu importantes, que
la configuration du sol peut y présenter. D'ailleurs, si l'existence
des mêmes lignes tenait à celle des cols, la plupart des vallées,
qui n'ont point de col à leur origine, mais dont la partie supérieure
est une sorte d'amphithéâtre s’appuyant sur la crête
d'une montagne, n'auraient point de thalweg, et les diverses vallées
qui rayonnent tout autour d'un sommet ne seraient séparées
les unes des autres par aucune ligne de faite; conséquences évidemment
inadmissibles.
En résumé, une ligne de faîte est une ligne de laquelle se détachent, sur tout son parcours, des lignes de plus grande pente qui en étaient d'abord à des distances nulles ou imperceptible et qui s’en éloignent à des distances notables ; un thalweg est une ligne à laquelle, sur tous les points de son parcours, viennent se réunir, en toute rigueur, ou du moins asymptotiquement, des lignes de plus grande pente qui en étaient d'abord à des distances sensibles ; tel est le caractère qui distingue ces lignes remarquables de celles de plus grande pente ordinaires, qui sont au contraire, sur tout leur parcours contiguës à leurs voisines.
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© Robert FERRÉOL 2020